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Droit des marques : les termes MY LUXURY devront être partagés par deux agences de voyage concurrentes sur la Côte d’Azur

Dans un arrêt récent en date du 9 décembre 2021, la cour d’Appel d’Aix-en-Provence s’est prononcée sur le risque de confusion entre deux marques quasi-identiques d’un point de vue conceptuel. La société MY LUXURY TRAVEL, agence de voyage à Monaco, enregistre en France la marque semi-figurative n°3959397, déposée le 8 novembre 2012 pour des services […]
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Dans un arrêt récent en date du 9 décembre 2021, la cour d’Appel d’Aix-en-Provence s’est prononcée sur le risque de confusion entre deux marques quasi-identiques d’un point de vue conceptuel.

  • Le contexte

La société MY LUXURY TRAVEL, agence de voyage à Monaco, enregistre en France la marque semi-figurative n°3959397, déposée le 8 novembre 2012 pour des services d’organisation et réservation de voyage en classe 39 :

Quelques années plus tard, la société MY LUXURY VOYAGE, elle aussi agence de voyage à Nice, enregistre la marque semi-figurative n°4240996 déposée le 15 janvier 2016 pour des services d’organisation de voyage en classe 39 :

Le 19 octobre 2018, la société monégasque MY LUXURY TRAVEL a fait assigner la société niçoise MY LUXURY VOYAGE, en annulation de sa marque, en contrefaçon de marque et subsidiairement en concurrence déloyale devant le tribunal de grande instance de MARSEILLE.

En défense, la société niçoise estime que la marque antérieure MY LUXURY TRAVEL devrait être annulée en l’absence de caractère distinctif.  

Déboutée en première instance par le tribunal, la société monégasque interjette appel le 9 mars 2020 en invoquant tout d’abord le caractère distinctif de sa marque. Elle soutient en revanche que dans la marque MY LUXURY VOYAGE, la séquence d’attaque MY n’est pas distincte par sa police et sa couleur des autres éléments verbaux, ce qui devrait conduire à prononcer sa nullité pour défaut de distinctivité.

Sur la contrefaçon, la société MY LUXURY TRAVEL invoque ensuite la proximité géographique des deux sociétés, l’antériorité de sa propre marque, la confusion résultant de recherches sur le net, l’utilisation sur la page Facebook d’une photographie représentant le rocher de MONACO et la similitude des services proposés pour affirmer que le risque de confusion est en l’espèce établi.

Sur l’action en concurrence déloyale, elle invoque les mêmes faits en rappelant que ceux-ci peuvent l’être sur ce fondement dès lors que l’action en contrefaçon est rejetée.

  • L’appréciation du caractère distinctif

La cour d’Appel rappelle en premier lieu et à juste titre que l’appréciation du caractère distinctif doit porter sur l’ensemble du signe constituant la marque et non uniquement dans l’élément verbal.

Ainsi, en l’espèce les juges considèrent que les mots « MY LUXURY TRAVEL » sont dépourvus de distinctivité, toutefois la marque complexe prise dans son ensemble présente un caractère arbitraire pour désigner le service de voyage ou séjour organisé. Elle n’a donc pas lieu d’être annulée.

  • L’appréciation de la contrefaçon de marque

Là encore les juges expliquent que l’appréciation de la contrefaçon doit être effectuée en comparant les marques litigieuses dans leur ensemble et il semblerait que ces derniers s’attardent davantage sur les différences que les ressemblances.

Visuellement, les marques MY LUXURY TRAVEL et MY LUXURY VOYAGE présentent d’importantes différences (couleurs, calligraphies, globe terrestre, etc.). Phonétiquement, si les deux premiers mots sont identiques, les mots en position finale (TRAVEL vs VOYAGE) diffèrent totalement et ne peuvent porter à confusion. 

Conceptuellement, la cour d’Appel relève toutefois une quasi-identité, les deux signes verbaux désignant le monde du voyage luxueux et personnalisé, mais non suffisante pour caractériser une contrefaçon.

En effet, les deux marques sont d’une très faible distinctivité, et leur similarité résulte du fait qu’elles sont particulièrement évocatrices de l’activité d’organisation de voyages qu’elles désignent. Dès lors, même si le risque de confusion doit être apprécié en tenant compte de la similitude des produits désignés, il n’en demeure pas moins que le risque de confusion n’apparaît pas en l’espèce constitué.

Les juges estiment donc que l’attention du public concerné se porterait davantage sur l’impression d’ensemble produit par les signes complexes, que sur le seul signe verbal qui, lui, est essentiellement évocateur de l’activité proposée.

Ce qui est critiquable car bien souvent le public mémorise une marque par ses éléments verbaux qui sont prononçables et non par ses éléments visuels. Ce d’autant plus que dans la vie des affaires deux marques semi-figuratives ne sont pas souvent apposées côte à côte pour y être comparées et distinguées. Cela laisse à penser que les clients devront, s’ils souhaitent recommander leur agence de voyage à des tiers préciser s’il s’agit de l’agence My Luxury « au globe terrestre » ou l’agence My Luxury « sur fond noir ».  

Enfin, la proximité géographique (Nice/Monaco) entre les deux sociétés, invoquée par la société MY LUXURY TRAVEL, ne peut être retenue dans l’appréciation du risque de confusion, et ce alors qu’il a été démontré que les deux agences fonctionnent essentiellement par l’intermédiaire du réseau internet.

  • La concurrence déloyale

Le risque de confusion ayant été écarté, et l’utilisation par une société concurrente d’une dénomination évocatrice de l’activité commune d’agence de voyage pratiquée par les deux parties ne pouvant être considérée comme fautive, la cour d’Appel déboute de nouveau la société MY LUXURY TRAVEL de sa demande subsidiaire en concurrence déloyale.

Source : https://www.legalis.net/jurisprudences/cour-dappel-daix-en-provence-ch-3-1-arret-au-fond-du-9-decembre-2021/

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